J’ai rencontré mon Maitre il y a quelques mois maintenant. Je l’ai salué sur une plateforme. À ce moment, je n’avais jamais eu de Maitre, vraiment. Quelques aventures ici et là en réel et en virtuel. Je souhaitais vivre une relation D/s autant en présence qu’à distance. J’adorais être soumise à des actions quotidiennement. J’aimais être salope au travail entre autres à l’insu de tous. Avant ma vie BDSM, j’étais déjà coquine. Au départ, je n’étais pas certaine que les exigences de mon Maitre étaient possibles pour moi. D’entrée de jeu, il m’a informé de son intérêt pour le contrôle : sur tout. Il proposait une relation 24/7.
Le récit de mon dressage en fera sourire plus d’un. Je me revois moi-même avec tendresse, il y a quelques semaines à peine. Maitres et soumises reconnaîtront un récit banal, un souvenir de leur propre histoire sans doute.
Comme je le disais d’entrée de jeu, je suis novice. Je ne connaissais presque rien à la soumission et encore aujourd’hui, je suis ignorante. Au moment où je rencontre mon Maitre, je ne corresponds en rien à ses attentes, mais il trouve en moi un “potentiel” par mon intérêt et mon dévouement à lui obéir je crois. Les premières semaines consistent à me rendre un minimum soumise et à me faire prendre conscience de ma condition. Il m’explique ces attentes en général: pas de cachette, pas d’autres hommes, éventuellement un contrôle sur tout. Je me montre d’accord. Mon dressage a commencé par mon habillement. C’était un dossier majeur alors. Un dossier qui se corrigeait un minimum assez facilement et rapidement. À ce moment, je suis emballée et juste contente de vivre enfin mon expérience. Je m’engage dans la transformation. En même temps, j’en bénéficie aussi personnellement. Une renaissance après une longue période de latence.
Mon sentiment alors est de participer à un jeu délicieux, non conventionnel, mais sans engagement. C’est une suite d’actions, des échanges, de l’excitation, des erreurs et des punitions, mais sans plus.
Je vis mon premier défi rapidement. Pourtant je suis salope à souhait, perverse sur les bords. J’agis facilement aux demandes de mon Maître. Je sais qu’il teste mes limites un peu, mon obéissance surtout et ma perversité. Je me sens comme un poisson dans l’eau. Comme ça se présente, j’en veux plus. La demande difficile arrive. Je suis incapable d’obéir. La sentence tombe: je suis punie par le silence de mon Maître pendant 24h. Je vis un choc. Je suis ébranlée par la punition plus que j’aurais pensé. Je me sens perdue. Je me revois, déstabilisée. J’ai peur que mon Maitre choisisse de m’abandonner. Après mon 24h, mon regard sur ma soumission a changé pour la suite. Mon engagement devient évident. Mon Maitre accroit son contrôle peu à peu. Je dois maintenant soumettre quotidiennement un compte-rendu, par exemple. Ses demandes et ses consignes sont parfois faciles, parfois non. Il est exigeant, sévère. Il punit mes fautes et mes erreurs. Il poursuit son dressage pour me façonner à son gout et à son image. Il est toujours juste et bienveillant. Je suis chanceuse d’avoir un Maitre tel que lui. Il est parfait en tout, il est parfait pour moi. Je suis en général une bonne soumise, j’obéis bien. Je comprends aussi que la soumission me va bien : mon plaisir réside justement dans mon obéissance et la satisfaction de mon Maitre.
Mon dressage se poursuit. Il exige mon appartenance. Ça me va, pour mon corps surtout, pour ma tête aussi, mon obéissance lui est acquise. La confiance s’installe. Lorsqu’il veut me voir lui offrir plus, j’hésite. Je n’arrive pas à dire que ma vie lui appartient. Il n’est pas content de ma retenue. Il travaille son dressage en ce sens. Il relève mes manquements, me punit par des réflexions, me félicite pour mon dévouement lorsqu’il se doit. Chez moi s’installe peu à peu un sentiment grandissant que je n’arrive pas à nommer. Dans mes comptes-rendus alors, je tourne autour du pot. Je m’imagine mon Maitre sourire. Il finit par m’aider, mon émotion c’est l’appartenance. Je n’ai jamais rien vécu de tel. Ce besoin de mon Maitre.
J’abandonne des morceaux de ma vie au contrôle de mon Maitre. Il me soumet à son contrôle partout en présence et à distance : il gère mon habillement quotidiennement, il surveille mes comptes, je demande pour mes dépenses, mes sorties, il fait ce qu’il veut de mon corps, il m’utilise pour son plaisir, je suis à son service, etc.
Malgré mon progrès, ma plus grande difficulté qui demeure à ce moment et encore aujourd’hui est de m’exprimer ouvertement à mon Maitre particulièrement mes émotions. Je reste davantage dans la description de mes journées. Je trouve ennuyant de partager mes problèmes quotidiens. Je me garde de lui parler de moi et de comment je me sens. J’essaie à l’occasion de le faire quand mon Maitre l’exige surtout. Je commets quelques fautes à ce sujet, mais rien de grave. Sauf qu’en fait, il y a beaucoup de choses que je ne dis pas : probablement pour éviter des ordres ou des conséquences de mon Maitre, probablement parce que je suis finalement réservée. Bien que j’ai laissé le contrôle à mon Maitre sur un ensemble de choses (presque tout je dirais), je me suis gardé un jardin secret.
À notre dernière rencontre, il m’a demandé mon cellulaire. Je le lui ai remis bien sûr. En panique, mais sans hésitation. Je savais qu’il allait y trouver une faute importante. Je savais que je pouvais, dans les minutes qui suivraient, perdre mon collier. J’étais là debout, lui tendant mon téléphone ne sachant comment me comporter. Je n’avais jamais fauté de cette façon depuis mon 24 heures de silence.Je voulais me dénoncer,mais sans savoir quoi dire pour exposer la situation. J’avais envie de pleurer, de me sauver. J’avais honte. Vraiment. Mon Maitre a bien perçu et vu ma détresse. Il m’a offert de lui révéler ce qu’il trouverait. Je savais bien qu’il serait préférable que je lui dise. Il n’y avait aucune chance qu’il passe à côté. Ces quelques secondes m’ont paru de longues minutes. J’ai fini par dire à mon Maitre qu’il y trouverait une discussion coquine.
En fait, un ancien amant avec qui j’avais rompu les liens il y a plusieurs semaines, lorsque que j’ai décidé d’offrir complètement ma soumission à mon Maître, m’a écrit pendant la période des fêtes. Bonne soumise, j’avais l’obligation de le communiquer à mon Maître. Grave erreur, je ne l’ai pas fait. Pire, l’ayant salué, j’ai encouragé cet homme à poursuivre la discussion. Pendant une période, je répondais occasionnellement et banalement, je gardais le lien actif sans en informer mon Maitre. Les allusions sexuelles se sont finalement glissées dans la conversation. J’ai accueilli le jeu érotique, je m’y suis engagée en cachette de mon Maître. Lorsque mon Maître a pris mon téléphone, il a lu que sa soumise s’amusait à exciter un autre homme par messages sans son consentement.
J’ai poursuivi mes tâches pendant qu’il prenait connaissance de ma faute. J’étais sous le choc. J’imaginais très bien sa colère mais surtout sa déception. Je pense que c’est le plus douloureux pour une soumise, pour moi en tout cas, la déception de son Maitre. J’espérais éviter le pire, son dégout.
Mon Maitre a su brillamment gérer sa colère, ce qui fait de lui un grand Maitre. Il a bien pris son temps pour réfléchir à la situation. Je pense que son calme m’a percuté d’autant plus, c’est froideur. J’appréhendais sa décision. Je lui ai offert de retourner chez moi. J’étais prête à tout entendre, mais pas son rejet. J’ai besoin de mon Maitre. Il a d’abord décidé de me rappeler ma position. Il m’a contrainte à plusieurs humiliations. J’étais soulagée. Pour le moment, il me gardait avec lui. Je me suis appliquée à ses demandes. Je voulais être exemplaire. Après m’avoir fait écrire à mon destinataire que mon Maitre refusait que je poursuivre la conversation, il a choisi de reporter sa décision plus tard.
J’ai profité de la séance pour savourer ces moments avec mon Maitre. J’ai réussi à éviter de penser à la sentence pour me concentrer sur le plaisir de mon Maitre. Mon Maitre dans sa sagesse a provoqué des moments pour me rappeler mon sentiment d’appartenance. Il voulait me voir dans mon attachement, dans mon émotion. Il connait ma retenue, il ne l’aurait pas accepté.
Je n’ai évidemment pas mérité de dormir au pied du lit de mon Maitre. J’ai été relégué à l’autre pièce.
Si je soumets ce récit aujourd’hui, c’est que mon Maitre m’a offert la chance de poursuivre mon éducation avec lui. Il a décidé que je serai punie par là où j’ai fauté. J’ai manqué de transparence et je n’ai pas communiqué avec mon Maitre. En bref, je garde des choses par-devers moi et je retiens de m’exprimer complètement. J’expose ici par ce récit, ma faute, ma honte, mes émotions. Je soumets au regard des autres mon dressage et mes imperfections. Je m’offre au jugement de la communauté. Je veux devenir la soumise que mon Maitre souhaite et mérite.